Ann-Dee Lamour / FFBB

Il y a une semaine, le Charnay Basket Bourgogne Sud a obtenu sa remontée immédiate en LFB après avoir dominé Chartres en finale des playoffs (2-0). Une réussite collective orchestrée par le nouvel entraîneur des Pinkies, Stéphane Leite.

Quelques jours après avoir décroché la montée, quel est votre état d’esprit ?

Fatigué déjà (rires). Non, je suis super content de ce que le club a réussi à faire car c’est incroyable de réussir à remonter après une descente. En général, c’est très compliqué parce qu’il faut reconstruire quasiment à zéro. On a eu la chance que certaines joueuses aient décidé de rester comme Coralie Chabrier, Johanna Muzet, Kankou Coulibaly. Sinon, c’est comme la première fois que je suis monté (avec Landerneau). Tu célèbres et puis, très vite, tu sais qu’il faut basculer sur la suite. C’est important de se projeter. Parce que le marché, c’est aujourd’hui. Beaucoup de clubs ont quasiment fini leur roster pour l’année prochaine. Donc je suis entre la célébration, la joie et la projection.

En 2018 déjà, vous avez été champion de Ligue 2 avec Landerneau. La saveur de la montée est-elle différente cette année ?

Oui, car quand je monte avec Landerneau, c’était plus que vital pour moi d’aller en Ligue Féminine. C’était l’objectif ultime. Là où je suis très content, c’est qu’on s’est lancé un rêve avec les dirigeants – le projet de monter sur deux ans - et qu’on a su aller au bout de ce rêve très rapidement. Cela a été une saison très agréable, parce que je n’ai pas eu beaucoup de soucis avec les filles qui ont été exceptionnelles. J’ai pu travailler un peu plus sur le structurel que ce que je faisais à Landerneau. Cette année, on a envoyé, on a charbonné. C’est la consécration de quelque chose.

Quels ont été les facteurs clés de votre réussite ?

Le premier mot que je donne à toutes les filles qui viennent bosser avec moi, c’est simplicité. On avait un groupe simple, disponible avec une envie de travailler. Quasiment aucune prise de tête dans la saison. Des filles capables de s’impliquer dans le projet. Parfois, elles n’étaient pas contentes pour elles mais elles ont su se taire au profit du collectif. Ensuite, c’est une communication forte entre les joueuses, entre le staff et les joueuses. On a mis zéro barrière. On s’est tous mis sur un pied d’égalité. Et puis, c’est la structuration sportive. On a ajouté un préparateur physique à temps plein, on a fait évoluer le responsable du centre de formation, on a travaillé avec une préparatrice mentale qui nous a permis de mettre des bases solides. Les filles ont répondu de manière incroyable et ont fait preuve de résilience quand on a eu des blessées.

Sur l’aspect purement basket, vous avez appliqué à la lettre l’adage qui veut que la défense fait gagner des titres…

On avait une équipe athlétique, ce qui nous a permis de défendre dur. On a passé beaucoup de temps en vidéo. On a un secteur intérieur que toute la ligue 2 nous enviait bien évidemment. Et puis on a une petite expérience du plus haut niveau pour certaines : Coco, Kankou, Johanna un peu, même si on avait une équipe extrêmement jeune avec notamment une paire de meneuses de moins de 23 ans. Le petit plus qu’on aurait pu faire évoluer, c’est développer le jeu rapide. Cela nous aurait permis de scorer un peu plus.

Vous avez déclaré que Charnay était "un club de village". Comment un club de village peut prétendre s’installer durablement en Ligue Féminine ?

Charnay (7 000 habitants) est à côté de Mâcon qui est une ville de plus grande taille, avec une agglomération assez grande. Les fondations sont posées. Elles ne sont pas encore assez solides. Le travail de structuration va se passer en plusieurs étapes. Il y a eu cette année une alchimie entre la mairie et le club qu’il y avait a priori moins par le passé. Christine Robin, la maire de Charnay nous a soutenus toute l’année. Le club peut s’installer. Il faut se donner le droit de rêver peu plus que les playdowns. Il y a un potentiel incroyable qui est inexploité. Les choses vont évoluer positivement, j’en suis persuadé. Le club de village deviendra un jour un club… un peu plus large.

Le dernier promu en Ligue Féminine, Toulouse, a fait l’ascenseur. A contrario, vous aviez bien négocié vos premières saisons dans l’élite à Landerneau. Comment voyez-vous la marche entre les deux divisions ?

La marche est incroyable. J’avais une très bonne équipe cette année parce que les dirigeants avaient fait le boulot pour garder un budget très cohérent pour la Ligue 2. Là, on va arriver en ayant un tout petit budget. Quand tu as moins d’argent, il faut travailler deux fois plus. On a fait le choix de ne pas tout renouveler. On va garder un bon 50 à 60 % de l’effectif. Ce sont des filles qui aiment le club et qui seront là quand il faudra se battre pour se maintenir. C’est ce qu’on avait fait avec Landerneau à l’époque, où on avait gardé cinq joueuses et on avait fait les playoffs la première saison. On a des jeunes joueuses à potentiel. À moi de les développer. On sait pertinemment que cela va être dur. Il faut savoir qui on est. Après avoir connu une saison où on a beaucoup gagné, le club, les supporters, les sponsors ne devront pas se démobiliser quand on perdra un peu plus. La première étape, c’est de se maintenir et, petit à petit, on va essayer de faire évoluer les choses, faire évoluer la structure, le budget, les joueuses. Il faudra qu’on soit patients.

Personnellement, vous revenez en Ligue Féminine après avoir connu une saison blanche*…

Individuellement, je suis vraiment ravi de pouvoir retrouver la Ligue Féminine. À la suite de Landerneau, ce n’était pas dans mon plan de carrière de repartir en Ligue 2. C’est beaucoup, beaucoup d’émotions. C’est une certaine libération malgré tout, suite à tous les événements passés, qui laissent des marques. L’émotion vient surtout de là.

* Stéphane Leite s’était engagé à Lattes-Montpellier mais le BLMA a fait volte-face juste avant le début de la saison 2021-22. De fait, l’entraîneur a connu une saison blanche.